> Mister Chi

—  Mister Chi, aimez-vous les cantatrices ?

— Oui, j’adore les cantatrices mortes. Également, sans aucun rapport, j’aime les écluses, en béton armé, ce grincement des vannes peu graissées, quand elles commencent à pivoter, me subjugue. J’ai un faible pour l’impertinent qui dissimule une grande timidité. Mes goûts à l’emporte-pièce sont à prendre ou à laisser, je crains que vous ne m’écoutiez plus désormais. Ceci étant dit, je raffole des usines où l’on fabrique des objets en métal fondu. Non moins que dans un synopsis les mots mis entre parenthèses, quand tout y trouve sa place. Sautons ainsi du coq-à-l’âne, sans lien logique, par amusement, comme si je me trouvais incapable de suivre un raisonnement. Je prends plaisir à retrousser les jarretelles sans arrêter la circulation du sang. Mais j’admire aussi les gamins qui répondent sur un ton gavroche. J’irais, je crois, jusqu’à vénérer l’hibiscus, à me réclamer d’un tel maître si les sectes n’étaient fortement battues en brèche. De même, je me donne pour mission de rassembler tout ce qui est en fer-blanc, j’en suis amateur, mais pas pour les cuvettes où l’on tire une corde pour qu’elles se vident. Je me suis aperçu que j’en pinçais pour les naïades qui peuplent les roseaux, elles éveillent mon désir, tandis que je les dérange sans le vouloir. Si je n’avais pas pris le pli d’une existence régulière, il m’arriverait de réclamer du yaourt à toute heure. C’est extravagant et à peine exagéré. Je fais assez grand cas des taupinières contre quoi il m’est impossible d’enfiler le masque du bourreau auquel tant d’autres se résignent. Je pourrais être un adorateur des calissons s’il ne fallait pas vivre à Aix. Faire des aveux sans savoir ce qu’il faut avouer est loin d’être un handicap. Avec une parfaite spontanéité j’admets être un fervent défenseur du vendredi 13 - que ce jour tombe un jeudi m’importe peu. Quand il convient que je m’abandonne mollement sur l’herbe d’une prairie, j’aime entendre le tintement des sonnailles. Autrement, je me montre éperdument amoureux des ramasse-miettes en étain. Pourquoi le cacher ? Je brûle de voir un jour une odalisque dans un harem qui ne se déparerait pas en ma compagnie. Autant employer sa vie à quelque chose qui en vaille la peine. Sinon, j’apprécie autant l’incognito que l’odeur du kouglof. S’ils ne semblent pas en concordance, laissons-les s’assembler selon leurs affinités sonores. Choisir serait prendre le parti du pire. J’ai eu du mal à intervenir pour départager les jazz-band et les ectoplasmes, ils demeurent finalement ex aequo. Par ordre de préférence, j’aime me mettre à table si la table est posée sur des tréteaux. Je peux avoir une mentalité fétichiste pour toutes sortes de zébrures. Pourquoi ? Je l’ignore. J’avoue ensuite éprouver une forte attirance pour les yourtes. Les pourquoi succèdent aux pourquoi. Enfin, je me plais à perdre mon ombre dans les labyrinthes. J’ai aussi le besoin viscéral de visiter un zoo le dimanche. J’aimerais que le musée du Louvre renonce à ses murs au profit d’un wagon-restaurant. Quant au quadrillage, je le recommande surtout pour le ratissage des allées. J’aime beaucoup de choses en fin de compte, sans que n’arrive de réponse à leur énigme.

— Aimez-vous les fanfares ?

— Non, je ne les aime pas, le bruit des fanfares ne tombe pas goutte après goutte. J’exècre aussi la salopette du mécano qui est retenue par des bretelles. Je déteste la généalogie quand elle nous fait parvenir à l’espèce actuelle. J’ai de l’aversion pour les nids-de-poule et les vendettas à un niveau équivalent. Lors de mes voyages gastronomiques la malveillance du qu’en-dira-t-on provoque en moi de la nausée. Si les walkyries n’existaient pas, je me porterais mieux. Je suis las de plein de choses, comme des pull-over et des pachydermes, ainsi que des dominos britanniques. Je me mords les lèvres dès que j’entends le mot “échographie”. Je me révolterai toujours à l’idée de consentir à trop de sacrifices. L’autosatisfaction choque un grand nombre de mes idées reçues. Quand on me contrarie en faisant un hommage aux raffineries, je griffe. Les faucilles suscitent ma méfiance, alors que la fumée grasse des hauts fourneaux, non. L’aérophagie me froisse jusque dans mon amour-propre. Je ne veux ni nuire aux enfants ni à la cantine qui les nourrit, malgré tout. Le fait qu’on ait cinq doigts à chaque main m’empêche de m’y opposer, ça n’apaise pas ma colère. La décongélation me répugne, pas moins que les perruques à la Louis XIV. Jamais je n’ai plus exécré la Kabbale qu’au sortir d’une réunion secrète. Je suis un type assez dégoûté pour soigner mes gerçures. Je n’aime pas les bastonnades lors des courses hippiques ou échanger des torgnoles avec un évêque en civil. Le sang-froid m’empêche de rester fidèle à la règle que je me suis assignée. J’entends s’agiter les innombrables dégoûts que soulève en moi cette humidité qui traîne au ras du sol. A la merci de dénonciations calomnieuses, je réalise que mon flegme est ébranlable. Je hais autant les oreillons que l’idée d’aller me jeter dans la Seine. Les balafrés m’agacent si bien qu’ils ressemblent aux chevaux qui fouettent la poussière. Si je casse du sucre sur la tête des marabouts, c’est qu’ils me cassent les pieds. Je n’aime pas les ultimatums qui entraînent la démolition d’une poissonnerie. Si je ne m’insurge pas contre les banquets, personne, ne pouvant y résister, ne le fera.

— Aimez-vous le lèche-vitrines ?

— Le lèche-vitrines m’est complètement indifférent, je fais preuve de stoïcisme devant ce qu’on retirera bientôt de l’étalage. C’est comme si vous me parliez d’un cageot plein de morues. Par ailleurs, le rodéo, le marquage du bétail et tout le reste des jeux du Far-West, qu’ils aillent se faire fiche ! Que voulez-vous, je suis un homme quelconque, qui parfois, n’est pas plus concerné par une chose que par une autre. Un allume-cigare n’est pas digne d’intérêt, j’en parlerais d’une manière imperturbable, en adoptant le ton de la réserve. L’auréole des saints m’ennuie, comme une poitrine flasque ou un intellectuel gnangnan. Je comprends l’impassibilité du dromadaire, ni hardi ni gai, il m’inspire confiance. En revanche, une femme de la Beauce ne suffit pas à me détourner de tout le reste. Surtout si elle est affublée des insignes de la dignité consulaire. N’importe quel objet en soi est banal, comme le tire-clou, conforme à des normes adaptées au plus grand nombre. Je ne cherche pas mille raisons pour me détacher d’un plat de macaronis. Pour en manger, sans montrer que je suis emballé, il me faut du moins en donner l’illusion. Les glaïeuls, je ne les croyais pas aussi vulgaires, ils en sont devenus anonymes à force d’être utilisés en bouquets de mariée. Un tube en P.V.C se détache difficilement de son néant. En évoquant le tube, on m’accusera de nuire au récit. Mais il faut reconnaître qu’il est vide sur toute sa longueur. Comme les experts-comptables, si ordinaires, si affreusement semblables à un demi-litre de lait, pourrais-je dire. J’ai remarqué cela depuis que la Hollande a perdu ses vertus magiques, je le dis avec le sérieux imperturbable du crustacé en conserve. Les vedette du box-office ne m’ont jamais troublé, même à la lumière crue du jour. Ce qui pourrait me plaire dans une soupe, se réduit en réalité à quelques trognons de choux. S’il existe un phénomène trivial, c’est bien le saint-simonisme, ou les couches-culottes à la rigueur, ne minaudons pas ! Quand l’Anglais s’humanise et se dépouille de sa raideur, il devient plus commun qu’un quadriréacteur. Ce que produit l’endoscopie est médiocre à l’échelle mondiale comparée aux milliers de litres de xylophène vendus. J’ai convenu tardivement qu’une fracture du fémur est inodore, et que le pré-salé de mouton, c’est trois fois rien par rapport au vol-au-vent de quenelles. Je vis comme absent des menues tragédies qui déchirent les amateurs de kayak. Leurs occiputs étant plus aplatis que bombés, ils ne valent la peine d’être longuement pesés. Des enfantillages en somme.

—  Aimez-vous les baobabs ?

— Comment le savez-vous ? Oui, je suis ému par les baobabs, leurs branches me bouleversent, on les dirait actionnées par une manivelle. Dès qu’un semblant de raison vient à poindre, je me mets fort à aimer les juke-box. Mais il faut toute mon indulgence pour leur pardonner de m’imposer leurs disques. Ailleurs, je me suis ruiné en poils de yack - sous-entendu ailleurs qu’ici - la circulation devient difficile à Paris, j’ai dû me rendre au pays des yacks. J’ai toujours cru que je serais mieux chez eux que là où je suis. Et c’est vrai, les yacks étouffent sous de mélancoliques bâillements, et ils m’ont légué cette secrète sauvagerie qui m’a rendu le monde supportable. Je les aime autant que le vermouth de Pithiviers, autant que les hirondelles de mer - je les entends qui se jurent l’une à l’autre de s’attendre. Je ne crois pas avoir dit que j’adore les élastiques, quand ils sont en sachets et qu’il n’y a pas à attendre d’eux aucune envolée, aucun élan. C’est comme les sarcophages, je me fais amener chaque nuit, en rêve, un nouveau sarcophage par le groom de l’hôtel qui fait la navette à l’office. C’est dire combien je me passionne pour ces boîtes où je me couche en haillons. A dire vrai, je préfère dormir en guenille, mais j’ai le plus souvent des haillons que je bride d’une ficelle. La chose la plus admirable chez un loqueteux, c’est l’effervescence de son esprit. Son trouble tumultueux produit chez moi des visions de palmeraies en flammes. C’est encore plus réjouissant que de mourir sous un éboulement. En général, j’idolâtre les acteurs qui jouent Quasimodo avec un manteau de zibeline. Ça me rappelle le paillasson à l’entrée des champignonnières, où j’aurais aimé être une mangouste comme les mangoustes rouges des premiers temps. J’ai aimé les réminiscences venues du tréfonds de mon être, avant de les craindre. A présent, je balaie tout ce passé au solstice qui célèbre la fuite de l’hiver. J’en suis venu à vénérer les groupuscules et plus ardemment aujourd’hui qu’ils me broient. Si les falaises d’Etretat périssaient, ça serait aussi pire pour un accordéoniste que si son ombrelle de mousseline s’envolait à l’approche d’un pianiste. Chez moi, une vague nostalgie trouve rarement à s’exprimer sur les jerricans qui puent le mazout. Plus ils sentent l’urinoir en été, plus la chance de voir des feux d’artifice est rendue possible. Cela peut paraître étrange, mais j’en suis venu à remarquer qu’il me serait honteux d’ignorer en moi le chien domestiqué. Que je serais heureux d’être chéri comme les vauriens aiment leurs hammams et les génériques de fin. Je me plais à partager le même lit sur un débarcadère, à craindre l’absence d’un bel adagio de Bach, à me contenter de l’ébahissement d’une friponne qui rêve d’une véranda.

— Aimez-vous les a priori ?

— Ah non, je hais les a priori, surtout les a priori des Maoris, amoindris sur pilori, à cause d’un bistouri. Je hais à fortiori les mots qui finissent en Ri. Les féculents ne sont pas en cause, ni aucun des lecteurs n’est à ce point coupable. Il s’agit d’un concours de circonstances malheureux. Juridiquement, que vous soyez conquistador ou le dentier d’un C.R.S, vous n’êtes pas incriminés. Mais à qui dois-je de détester le rangement, d’y consacrer du temps, de reprendre une vie rangée ? La prolifération de mes ustensiles demande des placards, au moins pour entreposer le white-spirit, mais pour mes cabriolets comment faire ? C’est pourquoi je n’aime pas les tiroirs, les meubles sous évier, les vaisseliers et les armoires  frigorifiques. Du coup, j’ai pris en grippe les cabriolets. Quelqu’un m’a dit : “Si les cabriolets, au même titre que la taxidermie, ont le malheur de répugner votre altesse, qu’elle essaie le macramé !” C’est ne rien comprendre à mes haines. Il me répugne de me courber par terre, aussi bien dans une basse-cour que devant un Jésuite. La monotonie des organigrammes, les baratins rasoir au téléphone, les jalousies inavouées au sortir d’un night-club, m’écœurent au point d’envier les suicidés, ou d’attraper la salmonellose. C’est au choix. Jamais je n’ai eu autant de plaisir à me trouver d’accord avec Maeterlinck. Mon ressentiment se porte sur les gesticulations du poulet qu’on saigne. Qu’y puis-je si j’inspire de l’antipathie aux signes du zodiaque. Chaque infanticide, chaque label du syndicat viticole, chaque invasion de mon corps par des indicatifs radiophoniques, produisent en moi un état allergique à toutes ces choses qui emploient du gaz inflammable, qui restent sur leur quant-à-soi, ou qui secrètent des déjections selon des procédures d’urgence.

— Aimez-vous les essoreuses ?

— Elle est bizarre votre question. Je ne me la suis jamais posée. Tout le monde vous répondrait par la négative. Je n’ai pu croire que la question des essoreuses sommeillait en vous. Il n’en demeure pas moins que je ne prête pas grande attention aux essoreuses. À vrai dire, je m’en fiche éperdument. Je dirais la même chose à propos des fritures d’éperlans ou d’une eau agitée en tous sens. Cet entretien m’intéresse si peu que j’en oublie les toiles cirées à pois verts qui m’indiffèrent au plus haut point. Sans parler de la parafiscalité, des prélèvements obligatoires, des taxes de séjour et des retenues sur salaire qui me font autant d’effet qu’une greluche en bigoudis en train de pousser un caddie rempli de biscuits bourratifs. Lorsque vous m’aurez forcé à convenir que je hais les théières en porcelaine, en serez-vous plus avancé ? C’est ici le lieu de honnir à jamais les paires de jumelles qu’on braque sur le gibier, au lieu de les porter sagement en bandoulière et tout à la fois, de couvrir de honte l’accent germanique. J’ai vu trop d’Allemands déshonorer leur langue en faisant des imitations d’eux-mêmes. Aujourd’hui, je sens qu’il n’y a rien au monde que je me donnerais la peine de désirer. Et ne me parlez pas de la maïzena ou de l’invasion des importations de produits étrangers. Je reste de glace devant un paquet de maïzena. L’univers entier, soudain, me paraît hostile. Je ne sais plus qui m’a reproché une certaine indolence que je porte partout et mon apathie devant une ramette de papier, qui en désappointe plus d’un. Je n’attendrais pas la dernière extrémité pour me plaindre des aérosols. Je ne m’offre pas naturellement à tout expliquer, mais les aérosols, je m’en balance ! Paraît-il que je ressemble à un animal à sang froid quand je réfléchis au concept de la non-existence. Face à un bec de gaz une torpeur m’envahit, ça me donne soif et des idées saugrenues me passent par la tête. Même les voliges d’une charpente que le vent soulève par à coups n’ont pas le pouvoir de me sortir de cet engourdissement où, pareillement, l’achat de stocks-options me plonge. Soyez plus attentif à vos questions !

—  Aimez-vous le nadir ?

— Le point opposé au zénith ? Oui pourquoi pas, je n’ai rien contre. De là à dire que j’y suis attaché, tendrement... Le nadir et moi ne sommes liés par aucun rapport de dépendance. Si vous préférez, j’apprécie le nadir pour son timbre poétique, comme j’aime l’acoustique ou le tachisme en peinture. Un lien subtil les unit, sans doute une formule mathématique pure à l’oreille. Au mieux, je me prosternerais à genoux sous la belle acoustique d’une cathédrale. Ai-je besoin d’autres preuves pour observer que je ne subis pas de surdité passagère ? Quant à la peinture, j’y prends tellement de plaisir que le tachisme abstrait me permet d’apprécier toutes les manières d’être de la couleur que le hasard provoque. Je suis porté à aimer tant de choses : l’optimisme des contribuables et les névroses chez les êtres exceptionnels ! Non, sans rire, je vais jusqu’à collectionner les abat-jour et les djellabas de Fez que les marchands faisaient porter aux esclaves. Mais tel je suis et tel je serai, enthousiaste jusqu’à vivre de transes, et secret au point de n’oser dire que je suis épris du papier kraft. Je m’étonne que vous n’éleviez d’objections qui puisse m’attirer un seul reproche. Le papier kraft, très mince, je le destine à envelopper le tabac, à en rouler des cigarettes, longues comme des mâts de cocagne, que je fourre d’herbes exotiques et qui brûlées sont la source de toutes les voluptés. Ceci dit, en écartant les bras, j’aime imiter l’avion qui vole en rase-mottes. Vous voyez, je reste accessible à tout et ne saurais me spécialiser dans l’étude des réacteurs à uranium, par exemple. Tout va si vite de nos jours. Aurais-je assez de souplesse et de curiosité pour suivre l’évolution scientifique qui de toute façon se fait sans moi ? Qui, mieux qu’un savant qui ignore à quels périls il s’expose, sait faire, à partir d’un quadrupède, un bipède, comme vous et moi ? Je vous le dis en confidence, rien ne prouve que l’archéoptéryx n’ait plus d’avenir. Si j’aime les sandwichs, en vente ambulante, c’est qu’ils resteront, pour l’homme qui errera longtemps sans asile, un moyen de sauver son espèce. Mes goûts, qui s’en remettent au goût de paraître des marginaux et à leur goût prononcé du scandale, loin de s’arrêter au pain de mie avec moutarde, se portent sur l’oiseau-mouche en oisellerie. Il a laissé en moi sa marque ineffaçable dont le sens m’a été expliqué sans que je ne puisse en parler à personne. À présent, que tout est éclairci, grâce au philodendron découvert au terminus de Marseille, grâce à l’utopie que constitue le radeau en roseaux comme moyen de naviguer, je me mets fort à aimer les paillotes à éolienne sur une île si petite qu’on dirait un écueil ou un récif, ne serait-ce que pour remplir de sable, les sabliers, où l’écoulement joue le rôle d’automatisme auxiliaire des activités du joueur de bandonéon. On se dupe de mille façons si l’on croit à l’honnêteté du macareux, à manger fennec dans les ziggurats, à l’ingéniosité de l’urubu à conduire une jeep, tout ça, c’est le genre de délire qu’on attrape dans un sauna. Je ne vous dis que ça.

— Aimez-vous les laiderons ?

— Non, je ne raffole vraiment pas des laiderons. Ils bâillent en écoutant Offenbach et ne tondent pas leur pelouse. Qui dit moche, dit triste et mal odorant. Tout bien pesé, les laideronnes, aux cheveux collés sur un crâne ovoïde, n’aiment pas comme moi, ni la flagellation sur leurs corps dénudés jusqu’à la ceinture, ni les stéréotypes qui me définissent comme propre, par opposition, aux laiderons qui sont, on ne peut plus sales. Ce raccourci amer n’est pas vrai de tous les créatures monstrueuses. Le préjugé qui m’afflige, c’est que je déteste les gouttières bouchées ou percées et que j’abhorre avec la même force le lambris des gîtes ruraux, qu’on pose du sol au plafond où pend un lustre cuivré. Je suis confondu d’apprendre que Derrick a joué dedans sa seule histoire d’amour et qu’un vice-consul accepta d’y dormir, précisément sous le canevas d’un cerf qui brâme au clair de lune. “Ça n’a pas de sens, ce que vous dîtes-là ! Que signifie tout cela, à la fin ?” pensez-vous peut-être, en caressant l’espoir de trouver le défouloir où vous pourrez gueuler à qui mieux mieux. A quoi je réponds “Si vous restez à écouter mes plaintes, sans m’interrompre, vous deviendrez complètement dingues !” Allez boire un rafraîchissement, le temps que je finisse de couvrir d’opprobres les termitières, que je lance l’anathème contre cette leucémie qui me ronge la tête. Comme beaucoup, je refuse de prêter attention au premier venu qui m’éclaire sur les orphelinats. Ils ont faits de lui un suicidaire, sensible à la gâchette de sa winchester. Comment pardonner aux fromages puants, au munster d’exister, aux huissiers en queue-de-pie, à l’eczéma qui ne vous console pas du type qui bégaie. Il est probable que j’ai la tête fortement abîmée, à en juger mon dégoût des kermesses et des sapinettes du Jura qui ensemble me rappellent, à s’y méprendre, l’épouvante de l’Holocauste dont les massacres étaient pratiqués à l’encontre des handicapés mentaux. Une chance qu’avec mes tares, je sois né plus tard. Ma déveine est d’en être traumatisé, mais comme rien ne le justifie, d’ordinaire je me tais, honteux d’être un faux rescapé et de vivre après deux générations fauchées dans la fleur de l’âge, honteux de faire partie de l’espèce humaine. Si infâme que soit un nazi, il ne l’est jamais autant qu’un nabab ou de l’humanité entière. Comment il se peut qu’un cinglé soit devenu abject, en se vouant à cette tragédie où se dégrade en sa personne le plus grand charnier de notre temps ! J’ai plutôt tendance à déprécier les chaînes télévisuelles qu’à les exalter, pour cela elles s’en sortent trop bien, à coups de pubs pour le ketchup et de séjours chez des maharajahs, pour faire grossir nos bedaines, établir de ridicules palmarès entre les pique-assiettes et ceux qui, rejetés des plateaux, se retrouvent en salle de réanimation. Le cachot devient l’endroit où l’on me fiche la paix, avec un bouillon, où des croutons et des pelures font trempette, il compose un semainier presque invariable. Le maton n’est pas obligé de me répondre, à moins de vouloir dire une vacherie. S’habituer au trouble de mes facultés psychiques serait préparer un beau gâchis !

— Aimez-vous les fertilisants ?

— Qu’est-ce j’en ai à faire des fertilisants ? Si nous inversions les rôles et que je vous demandais : est-ce que vous aimez les carquois ? Vous resteriez aussi béat que moi. Je n’utilise pas plus les fertilisants pour les aimer, que vous un carquois. Ne me parlez pas des ceinturons, ou des ostrogoths, de patchs, d’intercalaires, des feuilletons à la télé, des girafons, des lave-linges, du kolkhoze, du mardi gras, du nylon, de centres-villes, des hachoirs, de mon imperméable, et de je ne sais quoi encore !

—  Aimez-vous les rayures ?

— Oui, j’ai les rayures dans la peau, ainsi que l’immersion dans l’eau froide, les envolées, les cacahuètes, la paraffine, la non-violence, les débandades, les interludes, les justaucorps, les échafaudages, les vacances, l’absurde, les anglicismes, la zoologie, le point ironique, l’ornithorynque, les tacots, le jeu de cache-cache, les jonchées de feuilles, Bécassine, les dépotoirs, l’upsilon, la topaze, l’universalité, les huisseries, les olivettes, les bandanas, les felouques, les observatoires et les cahutes.

— Aimez-vous les agaceries ?

— Ah non, j’abomine les agaceries, tout autant que le saindoux, le hara-kiri, le linoléum, le jurassique, la maréchaussée, la gaudriole, l’acidité, la béatification, le zirconium, la fatuité, les liturgies, le nazisme, les paniers-repas, le k-way, les queues-de-cheval, les fichiers, le radio-taxi, les prospectus, les huîtres, les disputes, les gâchettes, l’Église, les injures, la sauvagerie, les pedigrees, les mailings, la lèpre, la déferlante, les gagne-pains, le velcro et l’impudeur.

— Aimez-vous le pifomètre ?

— Comment choisissez-vous vos questions ? Le pifomètre, mais je m’en fiche totalement. Vous me demanderiez si j’aime les ploutocrates, que je vous répondrais la même chose. Je me fous du pot-au-feu, des gastrites, des différentes sortes d’épuisettes, des quartiers-maîtres, des canalisations, des restoroutes, des hallebardes, des sans-culottes, de la Bourse, des frontières, du téléachat, des années-lumière, des vaporisateurs, de la kippa et de toutes ces choses.

—  Aimez-vous l’excellence ?

— Un peu. Ça dépend, mais j’apprécie davantage l’hibernation, les flash-back, les lits à baldaquin, les cache-pots, la netteté, l’acharnement sexuel, l’aigue-marine, les épitaphes, les bifurcations, les castagnettes, le paganisme, les halos, les compatibilités, les raccourcis, les jachères, les Gaulois, les incartades, le zinzolin, la fellation, les gibecières, les crevettes, la béchamel, les belles gambettes, les embellies, les récoltes, les kleenex, l’orang-outan, les hachures et les lèvres.

— Aimez-vous la papauté ?

— Non je n’aime pas ça, et d’ailleurs pas davantage la vaccination ni la thermochimie, ou la maigreur, les foires, les laïus, la léthargie, le décaféiné, l’électromagnétisme, les carpettes, les judas, les agglutinations, les kalachnikovs, les vainqueurs, le punching-ball, les sacrements, le psoriasis, le napalm, les quenelles, la déforestation, les sanisettes, l’uranium, le tapioca, le gigantisme, les ragondins, l’infantilisme, les mares, les maîtres-autels et les mites.

— Aimez-vous les mobylettes ?

— Les mobylettes, voyons, ça n’a aucun intérêt ! Parlez-moi de la morosité pendant que vous y êtes, ou d’une nursery, des ventouses, d’un accoudoir, des escabeaux, de la scarlatine, du baptême, des héliports, du méthanol, de l’oléiculture, des fast-foods, du caoutchouc, de votre demi-frère, de la pasteurisation, de votre living-room, du culturisme, des jars, des racines carrées, de votre trombine. De tout cela, je m’en fiche, voyez-vous ?

—  Aimez-vous la brièveté ?

— J’en suis énormément épris, ainsi que de la fumisterie, j’aime le Dalaï-lama, le baby-foot, l’alcool, le ferry-boat, l’agilité, les zygomatiques, le handball, les raidillons, le pamplemoussier, les généralités, la jouissance, l’éventail, le tango, le scepticisme, les oubliettes, les saucières, la dyslexie, les circonvolutions, les gratifications, les rubans adhésifs, les galetas, les langoustiers, les ventilateurs, les fumerolles et les haltes-garderies.

— Aimez-vous l’incarcération ?

— L’incarcération me déplaît, forcément, et encore plus les déviations sur les autoroutes, la niaiserie, l’infortune, les joutes, les calculatrices, l’eucharistie, le nettoyage de printemps, les oléoducs, les képis, l’intégrisme, l’unanimité, l’haltérophilie, les réprimandes, les kitchenettes, la laine synthétique, la macrobiotique, les parlotes, les tapisseries, la belligérance, l’indélicatesse, les élites, les vergetures, la lamproie, les managers, la Marne, le mois d’octobre, de novembre et de décembre.

— Aimez-vous le mésozoïque ?

— J’ignore ce que c’est. Il y a plein de choses dont je connais le nom, mais dont je méconnais la signification. Par exemple, ne me parlez pas de l’ocarina. Je serais incapable de vous dire si j’aime ça. Pareillement pour le parodonte, l’anacoluthe, le ranidé, la chlamydia, le sassafras, la diastole, l’énurésie, le tadorne, l’ouatine, la malvacée, le volapük et la nyctalopie. Évitez donc de me questionner là-dessus.

—  Aimez-vous les galipettes ?

— J’ai en effet un goût certain pour les galipettes, comme pour le jiu-jitsu, le darwinisme, l’accordéon, la dérision, les hédonistes, les laissés-pour-compte, les incendies, les duplicatas, l’aérobic, les haciendas, les randonnées, les nanas, les lianes, les câblo-opérateurs, les interviews, la gnôle, les éclaboussures, la luzerne, le gallo-roman, les joues, la camaraderie, les hallucinations, les rétrospectives, la féerie, les taille-crayons, les félicitations, la kératine et les pagodes.

— Aimez-vous le baragouinage ?

— Je ne porte pas le baragouinage dans mon cœur, ni la bave ni les mégères, la vérité, le safari-photo, les altesses, les vernissages, les wagons-citernes, les bondieuseries, le rafting, les effusions, les hostilités, les cachotteries, la démagogie, le formica, la zizanie, le phosphate, Napoléon, les obligations, les justifications, les électroencéphalogrammes, le karaoké, la tachycardie, les saintes-nitouches, le marteau-pilon, les indigestions et les langues mortes.

— Aimez-vous les adjudants ?

— Je suis stupéfait par vos questions. Je n’en ai rien à faire des adjuvants. Ni du balai-brosse, du calvinisme ou des bungalows. Comprenez bien que je me fiche du court-bouillon, des emplâtres, du mastic, des neutrinos, des ouvre-boîtes, d’un prix demi-tarif, des fibromes, du scottish-terrier, du jet-stream, des parapluies, des lamellibranches, de votre duffel-coat, des germaniums, des hommes-grenouilles et des râteliers.

—  Aimez-vous les échantillons ?

— Vous êtes bien tombé, je vénère les échantillons, ainsi que le croque-monsieur, les ancolies, le vermillon, le néolithique, les lapsus, l’inachèvement, le kaki, les déambulatoires, l’aisance, les saisons, l’hébétude, les faits divers, les rafraîchissements, l’irish-coffee, la dangerosité, la tequila, les olibrius, les lithographies, les parallélépipèdes, les fourmis, l’esbroufe, les quais, le steak, les témoins oculaires, les quetsches, les vahinés, les barbes-de-capucin, les câlineries et la gadoue.

— Aimez-vous les majordomes ?

— Ils me déplaisent, allez savoir pourquoi, je n’aime pas non plus les ballonnements d’estomacs, les chevrotines, les walkmans, les séismes, les haut-parleurs, les mappemondes, la paillardise, les dégringolades, les fiançailles, les alligators, les caméscopes, l’inertie, les lèchefrites, l’héraldique, les religieuses, les empoignades, les garnisons, l’ignominie, le gangstérisme, la banquise, la claustrophobie, les écrevisses, les funérailles, les jacinthes, la nostalgie et la surexcitation.

— Aimez-vous les serre-joints ?

— Qu’allez-vous chercher là ? Ça vous interpelle les serre-joints ? J’ai un désintérêt total pour les serre-joints, les autopompes, une buanderie ou le tapir, pour des condoléances, la jet-set, l’eschatologie, un variomètre, les prophétesses, la brillantine, les finances, la pie-grièche, une minerve, les télécabines, la dépressurisation, une raquette, les sectes, l’urticaire, les gaufrettes, votre arrière-grand-mère, ou l’immatriculation de mon véhicule.

—  Aimez-vous les abribus ?

— Oui, je suis tombé amoureux des abribus, j’aime aussi la cancoillotte, les interdits, l’endormissement, le lilas, les gadgets, les cactus, les daguerréotypes, l’eau-de-vie, le silence, les tourterelles, les amphétamines, le fiasco, le zénith, les rastaquouères, les kaléidoscopes, les palimpsestes, les roucoulades, la dextérité, les manchots, les vadrouilles, les Néerlandais, les quatre-mâts, le jeu de fléchettes, la science-fiction, le bernard-l’ermite, les déshabillés, les échecs et le féminisme.

— Aimez-vous les hypermarchés ?

— Pas du tout. Je dédaigne les hypermarchés, autant que le bénédicité, les tentacules, les nausées, les éviers, les betteraves, les jardinières, les yacht-clubs, les gigolos, la réalité, la pluie, les ovations, les sanglots, les haut-le-cœur, la morue, les inflammations, les alléluias, les seringues, les hécatombes, les klaxons, les demi-finales, la mégalomanie, l’opportunisme, le vacherin, la loterie, les basiliques, les calvities, les gazinières, les pantoufles, le cambouis et le garde-à-vous.

— Aimez-vous les agrafeuses ?

— Les agrafeuses ? Quelle futilité, je ne me soucie pas de ça, ni du vol-au-vent ni des antiseptiques, du bain-marie, des rince-doigts, de l’héroïsme, des on-dit, de Jésus, des industriels, des draps-housses, des caporaux, des knickers, du parisianisme, des entresols, des Malabars, du laudanum, des fourgons, des coupe-circuits, des porte-bagages, des gérondifs, des quignons de pain ; parlez-moi plutôt de l’ambiguïté.

—  Aimez-vous l’ambiguïté ?

— Je brûle pour l’ambiguïté, pour les marionnettes aussi, le free-jazz, les guinguettes, les jarretières, l’imbécillité, la lecture, les balançoires, l’idéalisme, la noirceur, le belcanto, la vanille, la caillasse, la tapenade, les œillades, les orgues de Barbarie, le maquillage, les moustachus, les papouilles, l’érosion, les fac-similé, les divertissements, les cachalots, la galanterie, les noisettes, les péripéties, les rondes-bosses, les igloos, les laissez-passer et Panama.

— Aimez-vous le bodybuilding ?

— Je vomis ce genre de choses, je n’aime pas davantage les dédicaces, le celluloïd, la puanteur, la traumatologie, la sinistrose, les râpes à fromage, les secousses, l’hermaphrodisme de certains animaux, les ornières, les coups de poing, l’acacia, le cholestérol, le bec-de-lièvre, les mecs, les quincailleries, les vidéoconférences, Hercule, les embargos, le déisme, la pelouse, les suprématies, les filous, la ferronnerie, la goujaterie, les homélies, la paperasserie, les adverbes et les gardes des Sceaux.

— Aimez-vous l’ammoniac ?

— Votre question, ne manque-t-elle pas d’originalité ? L’ammoniac, je m’en contrefous, comme des ganglions, de la gymnastique, du bas-côté d’un chemin, de l’intelligentsia, d’une déjection, d’un chauffe-plat, d’une aumônerie, de l’Épiphanie, du management, d’une carmélite, d’un haut-de-forme, de mes babouches, du dandinement de l’oie, d’une bouffissure, d’un édredon, d’une plante fourragère, des fonts baptismaux ou d’un interrupteur.

—  Aimez-vous les onomatopées ?

— Oui, je m’en délecte, c’est chantant, je les aime comme le son du banjo, j’aime les aéroglisseurs, le libertinage, les jacuzzis, le bambou, le fado, l’érotisme, les thrillers, le café-concert, le chêne-liège, les starting-blocks, les numéros, le papier-calque, les débarras, les garçonnes, les delphinariums, le yo-yo, la fantaisie, les tire-fesses, le taboulé, les globe-trotters, les idéogrammes, les ouvre-bouteilles, les vagabondages, les petits pois, les tsiganes, les gazettes, les inventions et les lesbiennes.

— Aimez-vous la logique ?

— J’en ai plutôt de l’aversion, de même je n’aime pas les ballons-sondes, les orpailleurs, les enfants de chœurs, les lèche-bottes, les hippopotames, les sergents-chefs, les rez-de-chaussée, les rocking-chairs, les pectoraux, le football, les récépissés, les macchabées, le défaitisme, les babouins, les caillebotis, le lamaïsme, le quotidien, les licenciements, le marteau-piqueur, les centenaires, les dancings, le gauchisme, l’hiver, les lévriers et les mousquetaires.

— Aimez-vous les journaux de location-vente ?

— Cette question est d’une telle banalité que je vais énumérer d’autres sujets aussi insipides. Évitez de me demander si j’aime mes muqueuses, la macromolécule, l’omerta, ou la panoplie de Zorro. Je m’en fous, voyez-vous, comme de la paume des mains, des pochettes-surprises, du camembert, de l’accent corse, du basket-ball, du delco de votre voiture, de la rédemption, de la scarole, de la télé-réalité et des enculés de toutes sortes.

—  Aimez-vous les serviettes-éponges ?

— Oui, j’apprécie particulièrement les serviettes-éponges, mais pas autant que les fantômes, le come-back, les jackpots, les baisers, le chow-chow, l’abricot, les auriculaires, les quiproquos, les palindromes, les gagne-petit, le gruyère, le franglais, les cerfs-volants, les ready-made, les décibels, l’éclectisme, les lupanars, l’ouï-dire, le Mah-jong, les rétroviseurs, le somnambulisme, les flonflons, les lance-pierres, les Hébreux, les insecticides, le tandem, le polystyrène et le séquoia.

— Aimez-vous les tiroirs-caisses ?

— Je ne m’entiche pas facilement d’un tiroir-caisse, ni n’aime les opérettes, les radars, le camping-car, les matricules, le catholicisme, la robinetterie, la voyance, les paillettes, les quolibets, les raz de marée, les mollusques, le noviciat, les tarentules, la réécriture, les gourous, les pignoufs, le cassoulet, les queues de poisson, les perceuses, la trigonométrie, les poubelles, la valse-hésitation, les boy-scouts, les lieutenants-colonels, les ronds-de-cuir et le salpêtre.

— Aimez-vous l’ensilage ?

— Pour moi, ça n’a aucune importance. Pas plus qu’un évêque, qu’une fanfreluche, le manioc, une cravate, un faire-valoir, un garde-meuble, une godasse, la mi-carême, des racontars, une hostie, une pierre à fusil, une arrière-boutique, le show-business, une décoction, les herpès, un octogone, une boule de neige, une circulaire, mes roubignoles, une potiche, du latex, une merde, ou un passe-montagne. Trouvez autre chose !

—  Aimez-vous les parpaings ?

— C’est vrai, je m’enflamme très vite pour un parpaing, j’aime également le mot « abracadabra », les flashs, les gâteaux de miel, le chardonneret, les fauteuils, les détectives, la bisexualité, les pin’s, les barbarismes, les imbroglios, le globe terrestre, les boutons-d’or, le plus-que-parfait, les chatouillements, les démonte-pneus, les nuages, les mamelons, les tomahawks, les vasistas, le mikado, les Lituaniens, les embrouillaminis, les fume-cigarettes, la cortisone et l’aumône.

— Aimez-vous l’eau minérale ?

— Non, je honnis l’eau minérale, autant que les Ave Maria, le macadam, les radioréveils, les lassos, les funérariums, les gyrophares, les scaphandriers, les revolvers, les coupe-ongles, les faux-semblants, les oursins, la toile émeri, le trotskisme, le tout-à-l’égout, l’occultisme, le shopping, le dogmatisme, les jumbo-jets, les bulldozers, le jogging, les impondérables, les caprices, le cannibalisme, les en-têtes de lettre, les hamburgers, les sanitaires, les molosses et les porte-savons.

— Aimez-vous les sacristies ?

— Vraiment, j’ai une gueule à visiter les sacristies ? Vous me parlez de ça comme si vous parliez de savonnettes. De l’une comme de l’autre, je m’en fiche royalement. Comme de votre tignasse, de votre bizarrerie, de votre micro et de vos questions. Je me fiche des bouillottes, des paperasses, des écuelles, des mégatonnes, des convenances, des latrines, de la galantine, des décalcomanies, des flaques d’eau et des rouflaquettes. Vous me faites complètement délirer.

—  Aimez-vous le delirium tremens ?

— Oui, autant que les alexandrins, le gorgonzola, le bouddhisme, les épouvantails, le djebel, les cadavres de mouches, les kangourous, les cercles vicieux, le genièvre, les faubourgs, le daltonisme, les tournebroches, les slogans, les écureuils, le cunnilingus, le donquichottisme, un double-crème, le fétichisme, les vermifuges, les récapitulatifs, le gras-double, les hippodromes, l’onirisme, les pas-de-porte et les tapeculs.

— Aimez-vous les mâts de cocagne ?

— J’ai une dent contre, et d’autres dents contre les abdominaux, les best-sellers, les esclandres, l’effroi, les croche-pieds, les dadais, le pyrex, les samouraïs, le bégaiement, les brushings, les polochons, les mille-pattes, l’internationalisme, les gendarmes, les hôtels de ville, les évangélistes, les pèse-bébé, les cache-sexes, les commissaires-priseurs, le déjà-vu, les disc-jockeys, les embouteillages, les fusils-mitrailleurs, les incinérateurs et les sacerdoces.

— Aimez-vous la serfouette ?

— Vous me fatiguez. J’ignore ce qu’est la serfouette. Qu’en ont-ils à faire vos lecteurs de savoir si j’aime la serfouette ?

—  Aimez-vous les anomalies ?

— Oui, je me prosterne devant les  anomalies, bien sûr, j’aime les pirouettes, la solitude, les enclumes, les miettes de pain, les mantes religieuses, les péripatéticiennes, les cornflakes, le boomerang, la préretraite, la réfrigération, les sucettes, les geishas, les locomotives, le flamenco, les e-mails, Montmorency, les palissades, le gin-fizz, la polémique, les auditoriums, le ball-trap, les dédommagements, le bouche-à-bouche, le cha-cha-cha, les dingos et les cercueils.

— Aimez-vous les grille-pains ?

— Ah non, les grille-pains, je les prends en grippe, c’est comme la béatitude, les coquillettes, la sécheresse, la nitroglycérine, la féodalité, la hiérarchie, les antirides, le check-up, les bateaux-mouches, les bracelets-montres, les dérouillées, les barbecues, l’extrême-onction, l’académisme, le chewing-gum, les cafards, la vivisection, la technocratie, les gourmettes, le fenouil, les impératrices, la musculation, la pestilence, les portes battantes, les prothèses, la saccharine, le bronzage et les canevas.

— Aimez-vous l’apex et la trypsine ?

— Passez à une autre question !

—  Aimez-vous le mercurochrome ?

— Je déifie le mercurochrome, tout comme j’aime les amazones, la criminologie, l’Orangerie, les mécènes, les pantalonnades, les échasses, les lucarnes, les gazelles, les bibliothèques, les trottinettes, les haïkus, la perspective, la quiche lorraine, les coccinelles, la cordillère des Andes, l’illogisme, les moustiquaires, les vierges, les transhumances, les épluchures, le laurier-sauce, les kilts, les portes-fenêtres, les majorettes, la pataphysique, le hareng et les interphones.

— Aimez-vous les sous-préfectures ?

— Je les maudis et tenez-vous le pour dit, je n’aime pas les cocottes-minute, les guéguerres, la macédoine, les familiarités, la discipline, la fiente, les défenestrations, la rudesse, la tauromachie, les autopsies, les obsèques, les lois martiales, la semoule, les fistules, les hyènes, la couleur pourpre, les S.AR.L., les rafles, la broncho-pneumonie, les mouches tsé-tsé, les égoïnes, la grandiloquence, les hernies, les limaces, les jérémiades, la macroéconomie et les sangsues.

— Aimez-vous la vacuole ?

— Et vous, que pensez-vous du barzoï ?

—  J’ignore ce que c'est. Aimez-vous les mégaphones ?

— J’aime les mégaphones, bien sûr, les rendez-vous aussi, le toboggan, les matinées, le chien shetland, la granny-smith, le pasodoble, les repose-pieds, les mélis-mélos, les échauffourées, les incisives, les énigmes, les cigarettes, le petit-déjeuner, la nougatine, les nichons, les osselets, les garde-robes, la dynamite, les rébus, les panoramiques, les madeleines, les vibromasseurs, les call-girls, l’harissa, les licornes, les patinoires et les ristournes.

— Aimez-vous les sarbacanes ?

— Je crache dessus monsieur, je n’aime pas aussi le tweed, les beignes, le volley-ball, les bacchantes, les autos-écoles, les sacs de couchage, le vouvoiement, les certitudes, le sot-l’y-laisse, les minibus, les trombinoscopes, l’affairisme, le nord-est, le statu quo, les convulsions, le vert-de-gris, le rococo, le pipi, les ronds-points, les salopards, les superlatifs, les top-modèles, les plumes vaccinostyles, les bandes-annonces, la cervelle de mouton et les tresses.

— Aimez-vous les bouche-trous ?

— On va en rester là. Je perds patience. J’ai trop l’impression de jouer ce rôle de bouche-trou.


© Hervé Bonhouvrier - Mister Chi